Au Cameroun, les établissements de micro-finance se créent et se ferment chaque jour. Quant aux raisons de ces faillites, d’aucuns pointent du doigt la mauvaise gestion de ses tenanciers, d’autres penchent plutôt aux tensions de trésorerie. En tout cas, la liste des EMF qui ont fait faillite au pays ne cesse de s’allonger. Nous vous replongeons dans les circonstances qui ont conduit quelques-uns à fermer les portes.

Cofinest

La fermeture s’est soldée par la liquidation

Les débiteurs de la microfinance sont redevables de la somme de 9,9 milliards de FCFA.

La Compagnie financière de l’estuaire (Cofinest), l’un des principaux établissements de microfinance (EMF) au Cameroun, a cessé de fonctionner le 21 février 2011. En cause, un nombre trop important de crédits compromis ou accordés à une poignée de personnes. Notamment l’Union sportive de Douala, club du championnat de football camerounais qui a une dette de 2,9 milliards de FCFA. En effet, ce sont 85 personnes physiques et morales, queFrançois Xavier Zingui, alors liquidateur, conviaient «à venir rembourser la totalité de leurs dettes, ou à défaut négocier un moratoire raisonnable de remboursement, faute de quoi le recouvrement forcé sera engagé à leur encontre», affirmait-il dans un communiqué rendu public en juin 2014. Ces débiteurs sont redevables de la somme de 9,9 milliards de FCFA envers l’ex-Cofinest.

Ceci étant, au 30 avril 2014, les remboursements effectués ou programmés ont concerné, quelque 48 636 déposants sur les 51 549 que comptait l’EMF à sa banqueroute. Le montant total des remboursements effectifs était de 624,315 millions de FCFA.

De même, plus de 776 millions de FCFA ont été mis en payement, mais n’ont pas encore été retirés par les bénéficiaires au guichet d’Afriland First Bank. 2 193 déposants ne sont pas encore concernés par les opérations de remboursement, soit 4,25% du portefeuille de l’ex-Cofinest, affirmait François Xavier Zingui.

Christian Happi

Fiffa

Des épargnants pris par la panique

Ceux-ci ne pouvaient ni prendre leur salaire, ni retirer leur épargne, ou encore avoir droit à des prêts bancaires.

En août 2012, First Investment for Financial Assistance (FIFFA) Bank tombait en faillite et emportait avec elle l’argent de ses épargnants. Conséquence, ceux-ci ne pouvaient ni entrer en possession de leur salaire, ni retirer leur épargne, ou encore avoir droit à des prêts bancaires. Face à ce blocage, le ministre des Finances avait publié un communiqué indiquant que les fonctionnaires donc les salaires sont domiciliés dans les comptes de l’EMF devaient être payés à travers d’autres établissements financiers.

Parallèlement, Fiffa avait été mis en liquidation bancaire le lundi 28 avril 2014. Une décision qui faisait suite à la décision de la Cobac (du 16 septembre 2013 NDLR), de retirer l’agrément de la Fiffa comme établissement de microfinance, selon René Nloka liquidateur bancaire désigné. Celui-ci affirmait que tous les créanciers chirographaires ou munis de sûretés composant la masse doivent, sous peine de forclusion, produire leurs créances dûment justifiés auprès du liquidateur.

En rappel, les raisons qui ont conduit à la faillite de l’entreprise sont les mêmes arguments avancés pour les autres EMF : A savoir, « l’octroi des crédits parfois non remboursables à des proches des promoteurs et des textes de la Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac) qui ne sont pas adaptés à une structure de micro-finance ou de crédit », expliquait un expert financier.

C.H.

GBF

Une faillite qui plombe le moral des déposants

Le PCA de l’entreprise avait par ailleurs disparu avec les épargnes des clients.

Le 7 juillet 2008, la Godly businessmen fund(GBF), un établissement de micro-finance d’obédience chrétienne, fermait ses portes. Une situation qui avait créé le doute dans la tête des épargnants. « Les gens-ci vont ouvrir finalement à quelle heure ? Alors qu’ils nous ont donné rendez-vous aujourd’hui », se demandait un épargnant. Client de l’EMF, Jean K., confiait pour sa part que c’est depuis plus de deux mois qu’il verse de l’argent à GBF sans en retirer. « La semaine dernière, j’ai épargné plus de 50 000 FCFA. Mais, depuis jeudi dernier, je veux faire un retrait, mais en vain. On m’a demandé de passer aujourd’hui, mais aucun bureau n’est ouvert. Toutes mes économies sont ici. Comment vais-je faire pour cette rentrée scolaire ? », s’interrogeait-il, désorienté.

A l’en croire, quand les clients venaient faire un versement, on prenait. Mais, « pour les retraits, on disait que c’était impossible ». Entre-temps, le PCA, un certain Ngatchou, pasteur d’une église pentecôtiste est introuvable. D’aucuns affirmaient qu’il était parti en Guinée Equatoriale, d’autres aux Etats-Unis.

Rappelons que la faillite de cette structure avait commencée le mercredi 8 août 2008 lorsque les bureaux de la direction générale, sis à Douala étaient restés fermés toute la journée. A l’absence d’un interlocuteur « sérieux », les épargnants piaffaient d’impatience surtout après avoir vu un gros cadenas avait été accroché à la porte métallique.

C.H.

Capcol

Des crédits non remboursés fait tomber l’entreprise

En plus de ce problème, l’EMF a également investi sans succès dans l’immobilier.

Il y a près de 4 ans, la Caisse populaire coopérative du Littoral (Capcol) entrait en cessation d’activités. Une situation qui était selon un haut cadre de l’entreprise, due à des tensions de trésoreries, aux retraits massifs des fonds par les clients. Egalement, aux crédits non remboursés par de gros épargnants et « on avait beaucoup investi sur l’immobilier parce que nous avons voulu que chacune de nos agences soit logée dans nos propres locaux », expliquait le patron de l’agence Olezoa à Yaoundé. Un argument qui à l’époque avait été rejeté par les experts financiers, justifiant que les biens immobiliers d’une entreprise doivent normalement être construits avec les fonds de ses tenanciers, et non avec ceux des clients.

De fait, c’est depuis avril 2012 que les épargnants de l’agence de Kribi, voyant les portes fermées à longueur de journée, avaient décidé de faire le pied de grue devant les portes de l’agence. Victor Sunday alors chef d’agence Capcol de Yaoundé, assurait que « la Commission bancaire d’Afrique centrale (Cobac) et le ministère des Finances son au courant de la situation que nous traversons. Ils pourraient intervenir sous peu. On vient également de signer un contrat avec un partenaire financier, et on n’attend plus que l’injection des fonds ». La solution qui consistait à vendre un certain nombre de biens immeubles faisant partie du patrimoine de Capcol n’a visiblement pas fonctionnée.

C.H.

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